
Je vais tenter ici de vous faire connaitre et apprécier comme je l’ai fait un livre, recommandé par notre frère Pascal. Il s’intitule « le monde nazi 1919-1945 »
Trois historiens du nazisme, Johan Chapoutot, Christian Ingrao et Nicolas Patin proposent un récit inédit, l’histoire complète du national-socialisme, de sa naissance en 1919 à son effondrement en 1945. Paru aux éditons Taillandier en septembre 2024.
Comment à l’occasion d’une crise majeure, celle de 1929, un militantisme fanatique, violent pétri de haine et de rancœur, permet-il de donner le pouvoir à un homme et au parti nazi ? Des croyances d‘un autre âge, le fanatisme utopique, le raciste primaire et apocalyptique conduiront en une douzaine d’années à l’effondrement d’un continent.
Cette carte postale invitant à célébrer « la journée de la police Allemande » au milieu de l’hiver 1941/42 nous plonge dans un paradoxe incommensurable et stupéfiant.
L’URSS est envahie en juin 1941, les états baltes, la Biélorussie, l’Ukraine sont transformés en république soviétique, 550 000 juifs d’union soviétiques ont déjà succombé fin décembre 41 et l’œuvre d’entraide hivernale, soupe populaire nazie, suggère à la population Allemande de faire un don à ces « héros » génocidaires.
235 millions d’européens subirent l’occupation, 47 millions périrent sous le joug des prédateurs qui étendirent leur pouvoir à la dimension de l’Europe.
Les auteurs nous immergent dans une vision du monde née dans une société bouleversée, « Mein Kampf » n’est pas l’unique clé mais bien des ressorts générationnels, le militantisme, la colonisation de l’appareil étatique.
La 2ème guerre mondiale résulte d’une suite de coups et des crises diplomatiques fabriquées par le pouvoir nazi.
1« la conquête du pouvoir » 2« Anatomie d’une chute » 3« une guerre génocide »

Plutôt qu’une ’idéologie, qui sous-entend une forme de superficialité facilement substituable à une autre, les auteurs préfèrent parler de culture ou de vision du monde.
« On a affaire à une véritable culture narrative un récit de l’origine de la race et de l’individu) comme des fins dernières, à un discours qui révèle le sens de la vie comme il détermine la valeur de l’être, qui explique le malheur et en promet le dépassement ».
Le nazisme s’inscrit dans la grande famille des contres révolutions nées dans les années 1790,
Avril 1933, Joseph Goebbels, chef du parti à Berlin déclare que le mouvement Nazi et le parti veulent effacer 1789 de l’histoire. Ce jour-là, biologie et politique fusionnent avec les décrets signés par Hitler pour la prévention de tares héréditaires et la stérilisation forcée pour certains types de pathologies et la loi contre la reconstitution des partis.
La race supérieure est née, l’opposition a été tranchée par des purges multiples « la nuit des longs coureaux » et des assassinats en règle.
En raison de sa supériorité naturelle le blanc est appelé à conquérir, coloniser et dominer le monde.
L’inquiétude démographique entre en synergie avec le racisme, Pologne et Afrique même combat ! Le noir ou le slave sont considérés comme des sous-hommes juste bon à travailler.
Des thèses dominantes d’un complot mondial visant à anéantir la race germanique seraient enseignées dès 1933. Et c’est la société allemande entière qui est confronté à une violence de masse.
Seule une biopolitique eugéniste, un mode de vie sain permettront de faire une communauté de la performance !

L’Allemagne nouvelle des 1933 réalise pleinement la germanicshe Demokratie et la germanische Freiheit.
Le führer n’est pas un dictateur il est celui issu des entrailles du peuple allemand, il est le sauveur qui propose de mettre fin à la misère et au malheur.
Pour beaucoup de nazis la guerre était perçue de manière positive
Les élites en place formulent « la théorie du coup de poignard dans les dos » véritable déni de défaite. Une fracture se crée entre les nationaux et les autres, Juifs, antinationaux et internationalistes.
Frustration, vexation et sacrifices vains des soldats amplifient le sentiment d’angoisse et de regrets, la dernière pièce du traumatisme est la signature du traité de Versailles le 18 janvier 1819.
Composés de vétérans et de jeunes hommes en quête de sacrifice et de violence traumatisés par la défaite les « corps francs » sont créés suite à la démobilisation de milliers de combattants de novembre 18 à septembre 1920
Mobilisation ambiguë composée de militaire et de politique à laquelle s’ajoutent outre la réalité de la révolution allemande, les fantasmes des émigrés russes de 1917 et c’est la naissance du complot judéo -bolchevique.
En Bavière, contexte de violences extrêmes et radicalisation importante début mai avec intervention des corps francs et de l’armée. Création d’une armé rouge, d’environ 10 000 hommes pour se protéger de la « terreur blanche » concrétisé par un épisode marquant, 20 membres de la société Thulé (composée d’antisémites et de racistes) en novembre 1918 sont arrêtés et 7 fusillés le 6 mai 1919 par l’armée rouge bavaroise, Hitler est extrêmement frappé par cet événement.
C’est dans ce contexte qu’Hitler un simple soldat militant politique nationaliste comme il en existe des milliers commence sa trajectoire politique.
Certes enfance peu heureuse, père violent et alcoolique, passions pour l’architecture et l’opéra non valorisées, sans opinion politique très affirmées, il entame sa radicalisation dans la révolution munichoise.
L’armée lui montre le chemin en le formant à la propagande et découvre sa vocation d’agitateur.
Un tribun populaire est né.
Le parti nazi entre 1919 et 1928 n’est encore qu’un groupuscule fanatique sans grande importance.
Vient ensuite le glissement vers la voie légale, à la suite du putsch ratée de la brasserie en novembre 1923, une crise profonde et un führer en prison amène à une refondation du parti en 1925.
Le parti nazi se construit autour de la détestation des « vieux » c’est un parti de jeunes hommes violents (la place des femmes est à la maternité), haine des femmes, des homosexuels et des juifs.
Organisations de grands meetings dans les brasseries bavaroise puis en dehors des salles, défilés gigantesques culte du chef etc…démonstration de force et de discipline.
La violence est un outil de déstabilisation et de conquête. Mise en scène des enterrement SA.
Victimisation et héroïsation. Première élection 21 mai 28, 2,6% seulement pour le NSDAP.
Jeudi noir, crash boursier de 1929 plonge l’Allemagne dans un chômage de masse crise sociale 1930 et va précipiter le basculement vers la dictature.
Les chômeurs ne votent pas tous pour le parti nazi mais les élites sont prêtes à liquider la démocratie pour se maintenir au pouvoir
Les nazis appliquent les techniques de propagande, l’intimidation des ennemies, violence de rue et l’antisémitisme. La Renégociation du traité de Versailles est un électrochoc.
Hitler acquiert à cette occasion une stature plus visible
A mesure que la crise sociale s’accentue le parti nazi récupère des votes de protestations, les classes moyennes et la bourgeoisie, les ventes de « Mein Kampf » explosent.
Le NSDAP utilise alors une double stratégie ; une aile radicale plus raciste et une aile plus malléable avec des thèmes plus flous « lutte contre le marxisme, système de Weimar ou culture non allemande. Promesse de communauté du peuple.
Hitler utilise les moyens modernes du monde industriel pour sillonner l’Allemagne, voiture, avion, radio.
31 juillet 1932, 37% des voies mais hooliganisme politique, uniformes dans les rues, salut nazi pour déterminer les amis des ennemis, La violence crée la peur et les mêmes s’instaurent en protecteurs.
Politique d’austérité du gouvernement mise en place, le gouvernement ne dispose pas de majorité au parlement, dissolution du Reichstag, l’Allemagne devient un régime d’exception géré par l’état d’urgence, confiance étrangère défaillante, panique bancaire, chômage disette,
Par le jeu d’alliance, et les intrigues de couloir le pouvoir est donné aux nazis et le 4 janvier 1933 le 3ème Reich né dans un gouvernement de coalition droite/ extrême droite, le cabinet Hitler entre en fonction 30 janvier 1933.
Hitler devient incontrôlable, les ennemis détruits, l’état de droit va pouvoir s’ériger en dictature.
Dictature de la participation, destruction et adhésion, fantasme d’expansion de la race et création d’un empire à l’échelle de l’Europe.
Pluie de décrets-lois pour une mise au pas de l’Allemagne qui devient un état centralisé.
Renvoi des fonctionnaires pervertis « lois de Nuremberg » 1935, exclusions raciales, privilège aux aryens.
Naissance des premiers camps de concentration.
Les ordonnances des 4 et 28 février 1933 mettent fin à la liberté d’expression de la presse.
Les syndicats sont détruits, création du » front allemand du travail » avec organisation de voyages, croisières, sorties culturelles diverses dans le but d’une rentabilité optimale du « facteur travail ».
Formation d’une communauté du peuple qui est également communauté de la performance.
Les élections au Reichstag avec liste unique le 12 novembre 1933 recueillent 92 %des suffrages pour le NSDAP.
Résignation à l’étranger, voir admiration de professeurs, hommes politiques et hauts fonctionnaires de l’ONUEF.
S’ensuit une série de purges dans l’armée, les généraux SA sont assassinés et Hindenburg taxé de sénilité.
Hitler a pour ambition les fonctions de chef de l’état et de chef du gouvernement donc pas d’élection, il légitimise au bas mot une centaine de meurtres par une loi le 3 juillet 1934 « loi sur les mesures prises pour la légitime défense de l’état »
Le 1er aout 1934 Hitler s’octroie les pleins pouvoirs par une loi le nommant chef de l’état et chancelier du Reich. Un plébiscite lui obtient le 19 aout 1934 89%93 d’approbation.
Les soldats de la Reichswehr prête allégeance inconditionnelle à Adolph Hitler.
L’Allemagne est en expansion territoriale continue de 1935 à 1943 avec la création de nouvelles institutions, tribunaux spéciaux, arrestations et incarcérations sans jugement
Les lois héritées et les codes en vigueur sont invalidés. Les nazis estiment que l’homme germanique sain de corps et d’esprit peut se gouverner lui-même par instinct sans texte et structure externe.
L’état est donc répudié, le 26 avril 1933 est créé l’office de la police secrète de l’état dont l’abréviation est GESTAPO, Himmler en devient le chef.
Hitler est peu enclin au travail des dossiers il a du mal à se concentrer, facilement influençable mais il sait utiliser les animosités des uns et des autres .
Le 3ème Reich est souvent considéré comme une dictature totale sur un peuple asservi piégé par un chancelier fou, la transformation du peuple en adeptes fanatiques du nazisme mais double jeu : brutalité pour les opposant et miel et récompenses pour ceux qui n’entrent pas dans les catégories cibles. Donc peu de protestations pour l’Allemand de base qui consent à un régime lui apportant des avantages et pour qui les groupes frappés lui sont assez indifférent.
Le 30 janvier 1933 l’arrivé d’un énième gouvernement n’émeut personne et le piège politique va se refermer sur l’Allemagne en 6 mois.
La terreur politique se met en place bien avant l’incendie du Reichstag, s’organisant souvent à l’échelle locale puis après l’incendie de façon beaucoup plus large et centralisée. En 1933 peu ou prou 200 000 prisonniers politiques.
La 2ème population cible est bien évidemment les juifs allemands
Le premier acte des nazis est le boycott des magasins juifs le 1er avril 1933 suivi des autodafés et l’interdiction de l’accès universitaire puis les lois de Nuremberg 1935 intervenant sur la vie privé de chaque allemand (pas de mariage mixte entre autre)
Démonstration et humiliations publiques pour les « déviants ».
C’est dans la deuxième moitié de 1938 que la politique de persécution change d’échelle et de nature.
17000 juifs polonais déportés, pogroms, nuit de cristal. 30000 juifs allemands rejoignent les déporté politiques.
Peu de prise de conscience et de résistance (George Elser attentat raté du 8 novembre 1939).
Février 33 discours radio, plan de 4 ans contre la paupérisation des paysans, réarmement , baisse du chômage, divertissements nombreux.
Nombreuses fêtes de mises en scène d’une Allemagne heureuse et travailleuse, activisme de la charité et de la bienfaisance, nombreux médecins.
Annexion de l’Autriche, aryanisation des commerces juifs, déplacement des enfants doués.
1938 conférence de Munich et signature d’une paix de polichinelle, annexions en chaines et 4 septembre 1339 déclaration de guerre au Reich de la France et du royaume uni.
La politique de destruction s’intensifie par la solution finale, 44 000 sites de destructions sont répertoriés mais il est évident que la Shoa n’aurait pas été possible sans l’adhésion et la participation des institutions et des populations à l’Ouest comme à l’Est.
Septembre 1939, la Pologne tombe et c’est le début d’une guerre meurtrière, jusqu’au 30 avril 1945 où berlin est investie par les Soviétiques.
Le Reich qui devait être millénaire est un champ de ruines, il s’écroule au bout de 12 ans le 30 avril 45 avec le suicide de son Führer.
Comme à chaque lecture ou visualisation d’un film sur de tels sujets, je reste abasourdie par la violence et la brutalité dont l’Homme est capable sans aucun scrupule ni regrets. Chaque jour apporte aux infos son quota de meurtres et d’assassinats dans un racisme larvé.
Sans être particulièrement naïve j’aimerais espérer que le monde apprendrait de ses expériences passées or si l’on regarde ce qui arrive aujourd’hui nous percevons la mise en œuvre des mêmes scenarios.
Augmentation de la violence au quotidien pour tout et rien, installation à la tête des nations d’hommes d’affaires ou de narcisses richissimes sans aucune connaissance politique ni la moindre éthique. Création de ministères « bidons », suppressions des fonctionnaires en place pour installer des béni oui-oui. Politique du « je veux, je prends », silence gêné de la communauté internationale qui surtout ne veut pas faire de vagues. Hommes politiques obsédés par une carrière et les joutes internes pour montrer leurs muscles loin d’une réflexion constructive sur la gestion globalisée de la planète.
Pendant ce temps-là dans nos loges nous méditons et planchons pour un monde idéal alors je me pose la question, avons-nous les outils pour arrêter ce déferlement de violences ? les outils et la volonté de faire ? comment pouvons inverser la machine et appliquer bienveillance et humanité au quotidien alors que le monde autour de nous s’embrase ?
J’ai lu ce livre assez facilement en dépit de quelques longueurs notamment sur le développement des combats mais il offre un éclairage très précis sur cette période très sombre de notre histoire. Comment malheureusement ne pas voir des similitudes et j’avoue qu’une certaine angoisse m’a envahie à cette lecture mais je veux avoir confiance en l’humanité et je veux croire , que en ce début d’ère du verseau le monde va retrouver son humanité .
J’ai dit
Annick S.
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