On entend parfois quelqu’un affirmer qu’il est difficile de faire parfaitement les choses les plus simples.
Et je dis bien parfois, car en réalité, on doit bien l’admettre, ce parfois se compte sur les doigts d’une main pour la durée de toute une vie.
Pourquoi, parfois, aime-t-on écouter les paroles d’une personne expérimentée, qui a une longue carrière derrière elle ? Et c’est aussi la raison pour laquelle il est très important que les plus jeunes apprennent des plus anciens.
Vous-mêmes, jeune personne, ou vous-même, ancien parmi les anciens, savez-pourquoi ? Car une personne expérimentée sait exprimer en des termes les plus simples les choses les plus compliquées.
La personne expérimentée est celle qui a fait « le tour de la question ». Elle a considéré son objet sous tous les angles. Elle connaît tous les chemins du savoir et du savoir-faire. Par exemple, un menuisier expérimenté aura utilisé tous les outils divers existants pour couper du bois, et il aura coupé toutes sortes de bois. Et dans toutes les conditions possibles de travail. Le nouvel apprenti, lui, ne sait même pas par où commencer son travail. Ni même quel travail faire.
L’ancien menuisier va lui expliquer quelle pièce réaliser, et comment la réaliser, avec les mots les plus simples qui soient. Mais cette simplicité, dans laquelle tout démarre, est une fausse simplicité, évidemment. Considérons les grands chefs cuisiniers. Ils acquièrent leur renommée par la finesse, la subtilité, la complexité des plats et des menus qu’ils réalisent. Ils réalisent des œuvres d’art culinaire. Mais ils revisitent aussi les grands classiques, c’est-à-dire qu’ils vont mettre à leur menu, également, des plats simples et populaires. Une purée de pommes de terre par exemple. Un grand chef est capable de faire de ce plat banal du quotidien, un plat succulent et surprenant. Et il fera cela en rajoutant une quantité minimale d’un nombre minimal d’ingrédients. Si on demandait à un apprenti cuisinier de réaliser un plat similaire, il en serait incapable. Sa purée de pommes de terre n’aurait même plus goût de pomme de terre. Considérons aussi les maîtres d’art martiaux.
Grâce à internet, j’ai pu voir les mouvements que fait un grand maître japonais maniant le katana (le sabre des samouraïs). Ses mouvements étaient d’une grande simplicité. Et ils ne semblaient pas vraiment rapides, face à ceux de ses adversaires. Pourtant, un geste, sinon deux, lui suffisait pour toucher mortellement l’opposant (il s’agissait bien sûr de vidéos d’entraînement avec des armes non létales). C’était comme si chaque attaque de l’adversaire ouvrait, pour le maître, un chemin direct vers les points exposés et vulnérables. Le maître voyait dans toute attaque une ouverture. Et grâce à toute sa vie de pratique des mouvements de cet art martial, ses pieds, son bassin, ses épaules, son bras, son poignet, tous bougeaient ensemble, un petit peu et doucement, et cela amenait la lame du maître au point vulnérable de son attaquant.
La banale purée succulente du chef, et le simple mouvement victorieux du maître, ne sont simples qu’en apparence, pour nous, vus de l’extérieur. Nous voyons devant nos yeux toute une vie d’expérience qui se déroule doucement, sans heurts, et qui produit un résultat parfait. Si simples sont les chemins du savoir et du savoir-faire de ces personnes expérimentées ! Pour le dire plus exactement, ces chemins qu’ils nous montrent, ces chemins qu’ils enseignent au nouvel apprenti, sont définis. Ces chemins sont définis dans un monde quasi-infini de possibles. Pour un chemin qui conduit à un résultat, les maîtres savent que dix chemins au-moins n’y mènent pas.
Les maîtres sont devenus maîtres car ils ont découvert toutes les erreurs possibles, toutes les mauvaises directions possibles, tous les cul-de-sac possibles. Ils ont découvert tout ce qui permet de créer, et tout ce qui détruit. Et tout ce qui est stable et neutre et solide. Et tout ce qui bouge sans cesse mais ne se laisse pas utiliser. Nous, et l’apprenti, voyons le maître qui nous montre un chemin sur une carte, et nous pensons que cela est simple car là est le chemin et il suffit de le suivre. Or le maître, lui, a fait la carte. La simplicité pour le débutant est une fausse simplicité, car elle ne dévoile pas l’envers du savoir : tout ce qui est-delà, mais très proche, des limites du chemin et qui ne conduit pas à un bon résultat.
Ce qui délimite les chemins fiables, établis, éprouvés, du savoir et du savoir-faire, au milieu de l’infini des possibles, ce sont au contraire les frontières de la complexité. Au fur et à mesure qu’il progresse dans sa vie, le maître voit mieux ce qu’il sait et ce qu’il sait ne pas fonctionner, ce qu’il sait ne pas connaître et qu’il peut inscrire dans son agenda d’apprentissage perpétuel, ce qu’il sait être frappé du sceau du doute, du non-fiable, de l’incertain. Et il voit, enfin, tous les vastes domaines qui sont au-delà de sa perception, car il est conscient des limites de son savoir et de sa façon de voir le monde.
Pourtant, dans l’infini des possibles, que ce soit dans les arts martiaux, dans la cuisine, dans le travail du bois, le maître progresse assurément. Pourquoi ? Pourquoi sa progression, alors que tout peut l’entraver ? Alors que l’infini des possibles ressemble plus à un fatras de petits segments de lignes de droites qui s’entrecoupent dans tous les sens. A contrario par exemple d’une sphère magnétique, dont la surface est constituée des ondes qui émanent dans un ordre absolument régulier de son centre. Dans une telle sphère magnétique, on s’imagine aisément progresser du centre vers la surface, et de la surface vers le centre, en suivant simplement les lignes de force magnétiques.
L’expérience du maître est toute de cohérence et d’unité. Considérons le monde des sports. Dans l’absolu, tous les mouvements existent, et tous les mouvements peuvent être combinés. Le saut d’une patineuse artistique peut s’enchaîner avec le lancer de pois du gymnaste par exemple.
Un geste de crawl peut être suivi d’un geste de brasse. Techniquement, biologiquement, cela est possible et faisable. Or nous savons que chaque discipline sportive possède une unité qui lui est spécifique. Et par laquelle nous reconnaissons ce sport. Considérons plus précisément les arts martiaux japonais : ils semblent si proches et pourtant, un enchaînement mélangé de mouvements de judo et d’aïkido serait tout à fait inefficace pour esquiver, attaquer ou se déplacer. Un coup de pied tournant de karaté inséré par exemple dans une séquence de mouvements de capoeira (art martial brésilien, que je connais pour le pratiquer depuis quelques années), serait tout à fait disgracieux et inefficace. À l’intérieur même de la capoeira, dont les mouvements sont pourtant tous bien définis, différentes familles de style existent. Et chaque famille de style est cohérente en elle-même.
Qu’est-ce qui tient ensemble cette unité, cette cohérence, qui va définir une pratique, un art, une discipline ? Dans l’absolu, on pourrait penser qu’il est bon pour l’être humain que nous sommes de pouvoir faire de tout et de savoir de tout, dans le monde qui nous entoure et qui est infini. Mais non, nous sommes organisés. Bien sûr, l’unité de nos disciplines, de nos pratiques, reflète les principes d’ordre que l’on peut voir partout dans l’univers, proche et lointain. Nous avons, comme l’univers qui nous nourrit et nous héberge en son sein, un penchant naturel pour l’ordre. En tant qu’êtres vivants, comme toute chose qui vit, nous avons un ordre défini. Quitter cet ordre, et c’est la mort s’annonce pour nous (maladies, guerres, accidents…) Mais cette généralité ne suffit pas expliquer, par exemple, l’unité de nos créations musicales, depuis les premiers temps de l’humanité.
Une seule ligne de création, lancée à travers l’infini des possibles, évidemment, pourrait se plier et in fine se briser sous le poids des contact … avec presque tout. S’étirer jusqu’à se rompre. Le simple passage du temps y suffirait. Nos disciplines se maintiennent parce qu’elles sont toujours trois lignes contiguës : une ligne de tête (intellect, réflexion, logique, savoirs), une ligne de corps (notre corps, ses mouvements, sa santé, ses perceptions) et une ligne de cœur (nos émotions, leur expression, la sensibilité). Chaque discipline est une création sur trois lignes simultanées. Chaque discipline est un faisceau. Un maître est une personne qui maintient vivante la discipline parce qu’il sait en jouer sur toutes les lignes : il est à fois physiquement apte, intellectuellement productif et émotionnellement vibrant. Les trois lignes se soutiennent entre elles, en permettant une réaction adaptée face à la diversité des situations dans le monde de tous les possibles.
Faisons une petite digression rigolote. Vous avez compris que chaque discipline se maintient parce que nous y allions nos corps, nos têtes et nos cœurs, en un faisceau souple et vivant, incarné par les maîtres. Il y a aussi l’environnement social, me direz-vous. Mais je classe cet environnement parmi le monde de tous les possibles : car nous constatons que nos disciplines sportives, artistiques, intellectuelles, se maintiennent par-delà les changements de société. Les « renaissances » de tel ou tel art, de telle ou telle tradition, de tel ou tel sport, de telle ou telle religion, après la montée puis la désintégration d’une société totalitaire, sont monnaie courante.
Non, imaginons plutôt ce que seraient les disciplines pour … des extraterrestres qui auraient un corps, une tête, un cœur, et peut-être autre chose en plus. Un faisceau à quatre, cinq ou plus
encore de lignes. Ou moins de lignes, mais autres, pour chacune de leur discipline de vie. Je ne
saurais pas en dire plus, ne pouvant dépasser les modalités de mon imagination humaine. Mais si
vous rencontrez par hasard un extra-terrestre, au moins je vous aurais prévenu de cette
éventualité : ils peuvent perdurer non pas parce qu’ils sont plus forts ou plus intelligents que
nous, mais parce qu’ils possèdent d’autres lignes vitales que nous. Ou plus de lignes vitales que
nous.
Venons-en maintenant, plus précisément, à la frontière de la complexité. Comment réagissent
nos trois lignes face à l’immensité de tous les possibles ? Et comment se fait-il que ces réactions
soient toujours cohérentes. Que toujours l’unité d’une pratique soit préservée ?
J’ai représenté précédemment le monde des possibles comme un fatras de petits segments de
lignes de droites qui s’entrecoupent dans tous les sens. Comment tracer un chemin là-dedans ?
Comment discerner un ordre, une organisation ? Sans doute dois-je maintenant vous présenter
ici toutes les méthodes scientifiques pour explorer et cartographier l’inconnu. Et toutes les
méthodes que les pionniers sportifs ont utilisées pour découvrir une nouvelle façon de bouger. Et
toutes les pistes que les artistes suivent pour projeter leurs émotions dans l’inconnu. Oui, cela ne
prendra certainement pas plus que dix ou douze-mille pages, et vous aurez là un bon aperçu de
tout ce que les maîtres de l’humanité ont accompli jusqu’à ce jour, toutes disciplines
confondues. Commençons.
…
Évidemment, je ne vais vous livrer ici que ma modeste recette personnelle, fruit de mon
expérience de vie et de ce que je comprends des maîtres que j’ai rencontrés, ou lus ou vus.
D’abord, il faut du travail, de la répétition, de l’effort, pour incorporer gestes et savoirs. C’est-à-
dire littéralement les inscrire dans notre corps. C’est un processus d’abord conscient et
intellectuel, qui ensuite à force de pratique devient réflexe et habitude, ne demandant finalement
plus aucun effort pour s’accomplir. Il faut de la logique, pour bien comprendre ce qui nous a été
transmis, et pour imaginer des suites, des prolongements, des extensions. Il faut de l’audace et de
la persévérance pour tester concrètement ces produits de notre imagination. Et pour les mettre en harmonie avec le chemin déjà existant, il faut un brin de folie en ce sens qu’il faut accepter de
fermer son esprit et d’aller dans l’inconnu. Et se laisser aiguiller par le sens de la beauté. Si nous
voulons affiner la cartographie de l’inconnu, nous devons le laisser rentrer un peu en nous. Nous
devons accepter, en nous, la présence d’un espace indéfini, pour nos idées, pour notre sensibilité,
pour nos émotions, pour la matière.
Cette recette fonctionne pour tout, de la science jusqu’à la cuisine. De la religion jusqu’à la
mécanique. Cette recette peut sembler un peu complexe, mais on la connaît par ailleurs sous un
terme simple et banal : la créativité. Fausse simplicité du mot même, évidemment… La
complexité est l’envers inséparable de la simplicité. Si vous sentez vibrer en vous le faisceau de
la discipline, travaillez et vous deviendrez maître. Le temps viendra, au moment opportun, pour
vous d’être à la fois le dépositaire de la discipline et son cartographe innovant. Et ne croyez pas
pouvoir décider vous-même de la date et de l’heure de cet avènement : c’est le destin qui vous y
mettra. Si vous êtes une jeune personne et que vous vouliez devenir maître, c’est une bonne
chose. L’humanité se réjouira d’avoir une personne positive et bienveillante comme vous,
sachant alliant simplicité et complexité, transmission et innovation. Tradition et modernité,
diront les frères sous le triangle. Si vous rêvez juste de puissance, le meilleur chemin pour vous
est de ne pas vous confronter à l’inconnu. Donc de ne pas essayer de devenir un maître. Le
maître sait relativiser la puissance, afin de comprendre sa juste fonction ; l’idiot la veut pleine et
entière.
Peut-être voulez-vous des éléments plus précis pour agir dans la complexité ? Je vous renvoie
alors vers mon livre L’art des problèmes, BoD, 2022. Succinctement, ici je vous affirme que la
complexité s’appréhende en faisant varier les façons de penser. Penser en particules versus
penser en lignes, penser en ondes, penser en espace, penser en temps, penser en mesures, penser
en écoulement, penser en fluide et penser en solide, penser en endroit et envers, en solaire et en
vitriol… Penser en hiérarchie, en base et en sommet, en ruissellement, en confluence… Mille et
une façons de penser : passez de l’une à l’autre. Par petits sauts ou par grands sauts, à vous de
décider. Confrontez-vous à l’inconnu, à l’oubli, au doute. Le doute est très important : il est le
lien permanent avec la réalité. Les gens qui ne doutent pas sont soit des idéologues abstraits, soit
des matérialistes qui ne croient que leurs yeux. J’ai écouté récemment la conférence d’une
écrivaine à propos de son livre sur les haies. Elle qui vit… à Paris et n’est ni agricultrice ni
horticultrice. A-t-elle pu écrire un livre qui ne soit pas idéologique ? Enchaîner des idées entre
elles par la seule force de la logique : on peut le faire, mais il faut tôt ou tard confronter ces
chaînes abstraites au monde concret. Et c’est une construction qui sera soumise au monde de
tous les possibles : cette seule ligne intellectuelle, non tressée avec une ligne de cœur et de corps,
ne tiendra pas longtemps. Elle ne sera jamais une pratique, une discipline. Et son auteur ne
pourra que difficilement la transmettre. Vous l’aurez compris : car on ne peut transmettre que ce
qui peut être incorporé. Le rôle des émotions est indispensable : tout être humain a faim d’être.
Être, c’est être complet, avec un cerveau qui imagine en direction des mystères, un corps qui
bouge en direction de la chaleur et de la lumière et un cœur qui vibre en direction du
merveilleux (sagesse, force et beauté). Sans ce triptyque, point de faim de la vie.
Puisse cet essai, cette méditation, sur le simple et le complexe vous donner envie
d’apprendre. La taille de votre espace vital est d’abord fonction de la taille de vos connaissances.
Les sots et les idiots vivent dans un monde petit, craignant ce qu’ils ne connaissent pas (absence
de curiosité et xénophobie), idolâtrant leurs possessions.
Et ne vous laissez pas berner par les faux maîtres. Certains ont un discours qui semble plein
d’une sage simplicité. Mais en-dessous, en cherchant un tout petit peu, vous ne trouverez rien
sinon des banalités, des intuitions, des préjugés, des jugements rapides, qui tiennent lieu pour lui
de vérités absolues. Un véritable maître atteste les limites de son savoir ; un faux maître affirme
avoir réponse à tout.
Benoît R. Sorel
Simplicidad y complejidad
Benoît R. SOREL,
A veces, se oye a alguien afirmar que es difícil hacer perfectamente las cosas más simples.
Y digo bien "a veces", porque en realidad, hay que admitirlo, ese "a veces" se cuenta con los
dedos de una mano a lo largo de toda una vida.
¿Por qué, en ocasiones, disfrutamos escuchando las palabras de una persona experimentada, que
tiene una larga trayectoria a sus espaldas? Y esta es también la razón por la cual es tan
importante que los jóvenes aprendan de los más viejos.
¿Ustedes mismos, jóvenes, o ustedes, los ancianos entre los ancianos, saben por qué?
Porque una persona experimentada sabe expresar en los términos más simples las cosas más
complicadas.
La persona experimentada es aquella que ha dado “la vuelta al tema”. Ha considerado su objeto
desde todos los ángulos. Conoce todos los caminos del saber y del saber hacer. Por ejemplo, un
carpintero experimentado habrá utilizado todas las herramientas posibles para cortar madera, y
habrá cortado todo tipo de maderas. Y en todas las condiciones de trabajo imaginables. El nuevo
aprendiz, por su parte, no sabe ni por dónde empezar su trabajo, ni siquiera qué trabajo debe
hacer. El viejo carpintero le explicará qué pieza debe realizar y cómo hacerlo, con las palabras
más sencillas.
Pero esa simplicidad, donde todo comienza, es una falsa simplicidad, evidentemente.
Consideremos a los grandes chefs de cocina. Ellos adquieren su fama por la delicadeza, la
sutileza y la complejidad de los platos y menús que elaboran. Crean verdaderas obras de arte
culinarias. Pero también reinterpretan los grandes clásicos, es decir, incluyen en sus menús
platos simples y populares. Como, por ejemplo, un puré de papas. Un gran chef es capaz de
convertir ese plato cotidiano y banal en un manjar delicioso y sorprendente. Y lo hará añadiendo
una cantidad mínima de un número mínimo de ingredientes. Si le pidieras a un aprendiz de
cocinero que hiciera un plato similar, sería incapaz. Su puré de papas ni siquiera sabría a papas.
Consideremos también a los maestros de las artes marciales. Gracias a internet, pude ver los
movimientos de un gran maestro japonés manejando un katana (la espada de los samuráis). Sus
movimientos eran de una gran simplicidad. Y no parecían realmente rápidos en comparación
con los de sus adversarios. Sin embargo, con un solo gesto, o a lo sumo dos, le bastaba para
tocar mortalmente al oponente (por supuesto, se trataba de videos de entrenamiento con armas
no letales). Era como si cada ataque del adversario abriera, para el maestro, un camino directo
hacia los puntos expuestos y vulnerables. El maestro veía en cada ataque una oportunidad. Y
gracias a toda una vida de práctica de los movimientos de este arte marcial, sus pies, su cadera,
sus hombros, su brazo, su muñeca, todos se movían juntos, un poco y suavemente, llevando la
espada del maestro al punto vulnerable de su atacante.
El simple puré delicioso del chef y el sencillo movimiento victorioso del maestro, son simples
solo en apariencia, para nosotros, vistos desde el exterior. Ante nuestros ojos, se despliega
suavemente toda una vida de experiencia, sin sobresaltos, produciendo un resultado perfecto.
¡Así de simples son los caminos del saber y del saber hacer de estas personas experimentadas!
Para decirlo con mayor precisión, estos caminos que nos muestran, estos caminos que enseñan
al nuevo aprendiz, están definidos. Estos caminos están trazados en un mundo casi infinito de
posibilidades. Para un camino que conduce al resultado, los maestros saben que al menos diez
caminos no lo hacen. Los maestros se convierten en maestros porque han descubierto todos los
errores posibles, todas las direcciones erróneas posibles, todos los callejones sin salida. Han
descubierto todo lo que permite crear, y todo lo que destruye. Y todo lo que es estable, neutro y
sólido. Y todo lo que se mueve sin cesar pero no puede ser utilizado. Nosotros, y el aprendiz,
vemos al maestro señalándonos un camino en un mapa, y pensamos que es simple, porque ahí
está el camino, y basta con seguirlo. Pero el maestro, él, ha hecho el mapa. La simplicidad para
el principiante es una falsa simplicidad, porque no revela el reverso del conocimiento: todo lo
que está más allá, pero muy cerca, de los límites del camino y que no conduce a un buen
resultado.
Lo que delimita los caminos fiables, establecidos y probados del saber y el saber hacer, en
medio del infinito de posibilidades, son precisamente las fronteras de la complejidad. A medida
que avanza en su vida, el maestro ve mejor lo que sabe, lo que sabe que no funciona, lo que sabe
que no conoce y que puede inscribir en su agenda de aprendizaje perpetuo, lo que sabe que está
marcado con el sello de la duda, de lo no fiable, de lo incierto. Y finalmente, ve todos los vastos
dominios que están más allá de su percepción, porque es consciente de los límites de su
conocimiento y de su manera de ver el mundo.
Sin embargo, en el infinito de posibilidades, ya sea en las artes marciales, en la cocina, en la
carpintería, el maestro progresa sin dudas. ¿Por qué? ¿Por qué progresa, cuando todo podría
obstaculizarle? Cuando el infinito de posibilidades se parece más a un caos de pequeños
segmentos de líneas rectas que se entrecruzan en todas direcciones. A diferencia, por ejemplo,
de una esfera magnética, cuya superficie está constituida por ondas que emanan en un orden
absolutamente regular desde su centro. En una esfera magnética así, se puede imaginar
fácilmente progresar desde el centro hacia la superficie, y de la superficie al centro, simplemente
siguiendo las líneas de fuerza magnéticas.
La experiencia del maestro está llena de coherencia y unidad. Consideremos el mundo de los
deportes. En teoría, todos los movimientos existen, y todos los movimientos pueden
combinarse. Un salto de patinaje artístico podría encadenarse con el lanzamiento de peso de un
gimnasta, por ejemplo. Un movimiento de crol podría ser seguido por uno de braza.
Técnicamente, biológicamente, es posible y factible. Sin embargo, sabemos que cada disciplina
deportiva posee una unidad específica que la define. Y es por esa unidad que reconocemos un
deporte. Consideremos más específicamente las artes marciales japonesas: parecen tan cercanas,
y sin embargo, una secuencia mezclada de movimientos de judo y aikido sería totalmente
ineficaz para esquivar, atacar o moverse. Un giro de patada de karate, insertado en una
secuencia de movimientos de capoeira (arte marcial brasileño, que practico desde hace algunos
años), sería completamente torpe e ineficaz. Incluso dentro de la capoeira, cuyos movimientos
están bien definidos, existen diferentes estilos familiares. Y cada familia de estilos es coherente
en sí misma.
¿Qué es lo que sostiene esta unidad, esta coherencia, que va a definir una práctica, un arte, una
disciplina? En teoría, uno podría pensar que es beneficioso para el ser humano poder hacer de
todo y saber de todo en el mundo que nos rodea, que es infinito. Pero no, estamos organizados.
Por supuesto, la unidad de nuestras disciplinas y nuestras prácticas refleja los principios de
orden que se pueden observar en todas partes del universo, tanto cercanas como lejanas. Al igual
que el universo que nos nutre y nos alberga, tenemos una inclinación natural hacia el orden.
Como seres vivos, al igual que cualquier cosa que vive, tenemos un orden definido. Abandonar
ese orden, y la muerte se anuncia para nosotros (enfermedades, guerras, accidentes…). Pero esa
generalidad no basta para explicar, por ejemplo, la unidad de nuestras creaciones musicales
desde los primeros tiempos de la humanidad.
Una sola línea de creación, lanzada a través del infinito de posibilidades, evidentemente, podría
doblarse y, al final, romperse bajo el peso del contacto… con casi todo. Estirarse hasta
romperse. El simple paso del tiempo sería suficiente. Nuestras disciplinas se mantienen porque
siempre son tres líneas contiguas: una línea de la cabeza (intelecto, reflexión, lógica,
conocimientos), una línea del cuerpo (nuestro cuerpo, sus movimientos, su salud, sus
percepciones) y una línea del corazón (nuestras emociones, su expresión, la sensibilidad). Cada
disciplina es una creación en tres líneas simultáneas. Cada disciplina es un haz. Un maestro es
una persona que mantiene viva la disciplina porque sabe tocar todas las líneas: es tanto
físicamente capaz, como intelectualmente productivo y emocionalmente vibrante. Las tres líneas
se sostienen mutuamente, permitiendo una reacción adecuada frente a la diversidad de
situaciones en el mundo de todas las posibilidades.
Hagamos una pequeña digresión divertida. Han entendido que cada disciplina se mantiene
porque movilizamos nuestros cuerpos, nuestras mentes y nuestros corazones en un haz flexible
y vivo, encarnado por los maestros. Ustedes podrían decir que también hay un entorno social.
Pero yo clasifico ese entorno entre el mundo de todas las posibilidades: ya que observamos que
nuestras disciplinas deportivas, artísticas, intelectuales, se mantienen a pesar de los cambios en
la sociedad. Las "renacencias" de tal o cual arte, de tal o cual tradición, de tal o cual deporte, de
tal o cual religión, después del surgimiento y desintegración de una sociedad totalitaria, son algo
común. No, imaginemos más bien qué serían las disciplinas para... extraterrestres que tuvieran
un cuerpo, una mente, un corazón, y tal vez algo más. Un haz con cuatro, cinco o más líneas. O
menos líneas, pero otras, para cada una de sus disciplinas de vida. No sabría decir más, ya que
no puedo superar las limitaciones de mi imaginación humana. Pero si se encuentran casualmente
con un extraterrestre, al menos habrán sido advertidos de esta eventualidad: pueden durar no
porque sean más fuertes o más inteligentes que nosotros, sino porque poseen otras líneas vitales
que nosotros. O más líneas vitales que nosotros.
Pasemos ahora, más concretamente, a la frontera de la complejidad. ¿Cómo reaccionan nuestras
tres líneas frente a la inmensidad de todas las posibilidades? ¿Y cómo es que estas reacciones
son siempre coherentes? ¿Cómo es que siempre se preserva la unidad de una práctica?
He representado antes el mundo de las posibilidades como un caos de pequeños segmentos de
líneas rectas que se cruzan en todas direcciones. ¿Cómo trazar un camino en medio de todo eso?
¿Cómo discernir un orden, una organización? Sin duda, ahora debería presentarles todas las
metodologías científicas para explorar y cartografiar lo desconocido. Y todas las metodologías
que los pioneros deportivos utilizaron para descubrir una nueva forma de moverse. Y todas las
rutas que los artistas siguen para proyectar sus emociones en lo desconocido. Sí, seguramente no
me tomaría más de diez o doce mil páginas, y tendrían ahí una buena visión de todo lo que los
maestros de la humanidad han logrado hasta el día de hoy, en todas las disciplinas.
Comencemos.
Evidentemente, no voy a entregarles aquí más que mi modesta receta personal, fruto de mi
experiencia de vida y de lo que he comprendido de los maestros que he conocido, leído o visto.
Primero, hace falta trabajo, repetición, esfuerzo, para incorporar gestos y conocimientos. Es
decir, literalmente inscribirlos en nuestro cuerpo. Es un proceso que empieza siendo consciente
e intelectual, pero que con la práctica se convierte en un reflejo y en hábito, que finalmente no
requiere esfuerzo alguno para cumplirse. Se necesita lógica para comprender bien lo que se nos
ha transmitido, e imaginar continuaciones, prolongaciones, extensiones. Hace falta audacia y
perseverancia para probar concretamente estos productos de nuestra imaginación. Y para
ponerlos en armonía con el camino ya existente, se requiere un toque de locura, en el sentido de
que debemos aceptar cerrar nuestra mente y adentrarnos en lo desconocido. Y dejarnos guiar por
el sentido de la belleza. Si queremos perfeccionar la cartografía de lo desconocido, debemos
permitirle entrar un poco en nosotros. Debemos aceptar, en nuestro interior, la presencia de un
espacio indefinido para nuestras ideas, nuestra sensibilidad, nuestras emociones, y la materia.
Esta receta funciona para todo, desde la ciencia hasta la cocina. Desde la religión hasta la
mecánica. Esta receta puede parecer un poco compleja, pero también la conocemos bajo un
término simple y común: la creatividad. La falsa simplicidad del mismo término,
evidentemente... La complejidad es la otra cara inseparable de la simplicidad. Si sienten vibrar
en ustedes el haz de la disciplina, trabajen y se convertirán en maestros. Llegará el momento
adecuado para que ustedes sean tanto los depositarios de la disciplina como sus innovadores
cartógrafos. Y no crean que pueden decidir por sí mismos la fecha y la hora de ese
advenimiento: es el destino el que los colocará allí.
Si son jóvenes y desean convertirse en maestros, es algo bueno. La humanidad se alegrará de
tener una persona positiva y bondadosa como ustedes, capaz de aliar simplicidad y complejidad,
transmisión e innovación. Tradición y modernidad, dirán los hermanos bajo el triángulo. Si solo
sueñan con el poder, el mejor camino para ustedes es no enfrentarse a lo desconocido. Por lo
tanto, no intenten convertirse en maestros. El maestro sabe relativizar el poder para entender su
verdadera función; el necio lo desea pleno y absoluto.
¿Quizás desean elementos más precisos para actuar en la complejidad? Entonces les remito a mi
libro El arte de los problemas, BoD, 2022. Resumidamente, aquí les afirmo que la complejidad
se aborda variando las formas de pensar. Pensar en partículas versus pensar en líneas, pensar en
ondas, pensar en espacio, pensar en tiempo, pensar en medidas, pensar en flujo, pensar en fluido
y pensar en sólido, pensar en lo visible y lo invisible, en lo solar y en el vitriolo… Pensar en
jerarquía, en base y en cúspide, en derrame, en confluencia… Mil y una formas de pensar: pasen
de una a otra. Con pequeños saltos o grandes saltos, ustedes deciden. Enfréntense a lo
desconocido, al olvido, a la duda. La duda es muy importante: es el lazo permanente con la
realidad. Las personas que no dudan son o bien ideólogos abstractos, o bien materialistas que
solo creen en lo que ven.
Recientemente asistí a una conferencia de una escritora sobre su libro acerca de los setos. Ella
vive... en París y no es ni agricultora ni horticultora. ¿Pudo escribir un libro que no fuera
ideológico? Encadenar ideas entre sí solo por la fuerza de la lógica: se puede hacer, pero tarde o
temprano hay que confrontar esas cadenas abstractas con el mundo concreto. Y es una
construcción que estará sujeta al mundo de todas las posibilidades: esa única línea intelectual,
no entrelazada con una línea de corazón y cuerpo, no se mantendrá por mucho tiempo. Nunca será una práctica, una disciplina. Y su autor difícilmente podrá transmitirla. Lo habrán
comprendido: solo se puede transmitir lo que puede ser incorporado. El papel de las emociones
es indispensable: todo ser humano tiene hambre de ser. Ser es ser completo, con un cerebro que
imagina en dirección a los misterios, un cuerpo que se mueve hacia el calor y la luz, y un
corazón que vibra hacia lo maravilloso (sabiduría, fuerza y belleza). Sin este tríptico, no hay
hambre de vida.
Que este ensayo, esta meditación sobre lo simple y lo complejo, les despierte el deseo de
aprender. El tamaño de su espacio vital depende primero del tamaño de sus conocimientos. Los
tontos y los necios viven en un mundo pequeño, temiendo lo que no conocen (falta de
curiosidad y xenofobia), idolatrando sus posesiones.
Y no se dejen engañar por los falsos maestros. Algunos tienen un discurso que parece lleno de
una sabia simplicidad. Pero, al buscar un poco debajo, no encontrarán más que banalidades,
intuiciones, prejuicios, juicios rápidos que para él equivalen a verdades absolutas. Un verdadero
maestro reconoce los límites de su conocimiento; un falso maestro afirma tener respuesta para
todo.
La complejidad es, como decíamos, el reverso inseparable de la simplicidad. Si ustedes sienten
vibrar dentro de sí el haz de la disciplina, trabajen, y llegarán a convertirse en maestros. El
tiempo llegará, en el momento adecuado, para que ustedes sean, a la vez, guardianes de la
disciplina e innovadores en su cartografía. Pero no se equivoquen: no serán ustedes quienes
decidan el día y la hora de ese logro. Será el destino quien les ponga en ese lugar.
Si son jóvenes y aspiran a convertirse en maestros, eso es algo excelente. La humanidad se
congratulará de tener a alguien positivo y benévolo como ustedes, alguien capaz de conjugar
simplicidad y complejidad, tradición e innovación. “Tradición y modernidad”, dirán los
hermanos en torno al triángulo. Si, por el contrario, lo único que desean es poder, entonces lo
mejor para ustedes es evitar enfrentarse a lo desconocido. En ese caso, no intenten convertirse
en maestros. El maestro relativiza el poder, comprendiendo cuál es su verdadera función; el
necio lo busca sin medida, queriéndolo completo y absoluto.
Quizás deseen consejos más concretos para enfrentarse a la complejidad. Les remito, entonces, a
mi obra El arte de los problemas (BoD, 2022). De forma resumida, les puedo decir que la
complejidad se comprende mejor cambiando las formas de pensar. Pensar en términos de
partículas, o en términos de líneas; pensar en ondas, en espacio, en tiempo; pensar en términos
de medidas, de flujo, de lo fluido o lo sólido; pensar en términos de lo visible y lo oculto, en lo
solar y en lo alquímico... Pensar en jerarquías, en bases y en cúspides, en derrames y
confluencias... Existen mil y una maneras de pensar: pasen de una a otra. Ya sea con pequeños o
grandes saltos, ustedes deciden. Enfréntense a lo desconocido, al olvido, a la duda. La duda es
fundamental: es el vínculo permanente con la realidad. Quienes no dudan suelen ser ideólogos
abstractos o materialistas que solo creen en lo que ven.
Recientemente, escuché una conferencia de una escritora sobre su libro acerca de los setos. Ella
vive... en París, y no es ni agricultora ni horticultora. ¿Pudo haber escrito un libro que no fuera
ideológico? Encadenar ideas únicamente por la fuerza de la lógica es posible, pero tarde o
temprano esas cadenas de pensamiento deben confrontarse con el mundo concreto. Y es una
construcción que deberá enfrentarse al mundo de todas las posibilidades: una línea puramente
intelectual, que no esté entretejida con una línea emocional y física, no se mantendrá en pie por
mucho tiempo. Nunca se convertirá en una práctica, en una disciplina. Y su autor difícilmente
podrá transmitirla. Como ya habrán comprendido, solo se puede transmitir aquello que puede
ser asimilado e incorporado.
El papel de las emociones es indispensable: todo ser humano anhela ser. Ser significa ser
completo: tener una mente que imagine en dirección a los misterios, un cuerpo que se mueva
hacia la luz y el calor, y un corazón que vibre hacia lo maravilloso (sabiduría, fuerza y belleza).
Sin este tríptico, no hay hambre de vida.
Espero que este ensayo, esta meditación sobre la simplicidad y la complejidad, despierte en
ustedes el deseo de aprender. El tamaño de su espacio vital dependerá, en primer lugar, del
tamaño de sus conocimientos. Los necios y los tontos viven en un mundo pequeño, temen lo que
no conocen (por falta de curiosidad y debido a la xenofobia) e idolatran sus posesiones.
Y no se dejen engañar por los falsos maestros. Algunos pueden tener discursos que aparentan
una gran simplicidad sabia. Pero, si escarban un poco, no encontrarán más que banalidades,
intuiciones, prejuicios y juicios precipitados, que para ellos pasan por verdades absolutas. Un
verdadero maestro reconoce los límites de su saber; un falso maestro asegura tener una respuesta
para todo.
Benoît R. Sorel
Simplicity and Complexity
Benoît R. SOREL
Sometimes, you hear people say that it is difficult to do the simplest things perfectly. And I mean sometimes, because, in reality, we must admit, this sometimes can be counted on the fingers of one hand over a lifetime.
Why do we sometimes enjoy listening to the words of someone experienced, someone with a long career behind them? This is also the reason why it is so important for younger people to learn from their elders.
Do you know why, young person? Or you, elder among the elders?
Because an experienced person knows how to express the most complex things in the simplest terms.
The experienced person is someone who has "covered all the bases." They have considered their subject from every angle. They know every path of knowledge and skill. For example, an experienced carpenter will have used every possible tool for cutting wood and will have worked with all kinds of wood. And they will have done this in every possible working condition. The new apprentice, on the other hand, doesn’t even know where to begin. Not even what task to start with. The old carpenter will explain what piece to make and how to make it, using the simplest words possible.
But this simplicity, where everything begins, is a false simplicity, obviously. Consider great chefs. They gain their fame through the refinement, subtlety, and complexity of the dishes and menus they create. They craft culinary works of art. But they also revisit the classics, meaning they will add simple, popular dishes to their menu. Mashed potatoes, for example. A great chef can turn this everyday, banal dish into something succulent and surprising. And they will do this by adding the minimal amount of a few select ingredients. If you asked a beginner cook to make a similar dish, they would fail. Their mashed potatoes wouldn’t even taste like potatoes.
Consider also the masters of martial arts. Thanks to the internet, I have seen the movements of a great Japanese master wielding a katana (the samurai sword). His movements were incredibly simple. And they didn’t even appear that fast, compared to those of his opponents. Yet, one or two moves were enough to mortally strike his adversary (of course, these were training videos with non-lethal weapons). It was as if every attack from the opponent opened a direct path for the master to the exposed and vulnerable points. The master saw every attack as an opening.
And thanks to a lifetime of practicing these martial art movements, his feet, hips, shoulders, arm, and wrist all moved together, smoothly and subtly, bringing the master’s blade to his attacker’s vulnerable point.
The chef’s simple yet delicious mashed potatoes, and the master’s effortless, victorious movement, are simple only in appearance to us, seen from the outside. What we see is a lifetime of experience unfolding smoothly, without obstacles, producing a perfect result. How simple are the paths of knowledge and skill for these experienced individuals! To put it more accurately, the paths they show us, the paths they teach the new apprentice, are well-defined. These paths are defined within a nearly infinite world of possibilities. For every path that leads to success, the masters know that at least ten others do not. Masters become masters because they have discovered every possible mistake, every wrong turn, every dead end. They have discovered everything that enables creation, and everything that destroys. And everything that is stable, neutral, and solid. And everything that constantly moves but cannot be harnessed.
We, and the apprentice, see the master pointing out a path on a map, and we think it is simple because the path is there, and all we have to do is follow it. But the master is the one who made the map. Simplicity for the beginner is a false simplicity, because it does not reveal the other side of knowledge: everything that lies beyond, but very close to, the edges of the path, and that does not lead to success.
What defines the reliable, established, and tested paths of knowledge and skill in the midst of the infinite possibilities are, in fact, the boundaries of complexity. As the master progresses through life, they gain a clearer view of what they know, what they know does not work, what they know they do not understand and can add to their lifelong learning, what they know to be marked by doubt, uncertainty, and unreliability. And finally, they see all the vast domains beyond their perception because they are aware of the limits of their knowledge and their way of seeing the world.
And yet, in that infinite realm of possibilities—whether in martial arts, cooking, or woodworking—the master progresses with confidence. Why? Why do they progress, when everything seems to stand in their way? When the infinity of possibilities seems more like a jumble of short, intersecting lines in every direction. In contrast, for example, to a magnetic sphere, whose surface consists of waves emanating in a perfectly regular order from its center.
In such a magnetic sphere, we can easily imagine progressing from the center to the surface, and from the surface back to the center, simply by following the lines of magnetic force.
The master’s experience is one of coherence and unity. Let’s consider the world of sports. In absolute terms, all movements exist, and all movements can be combined. A figure skater’s jump could be followed by the shot-put throw of a gymnast, for instance. A crawl stroke could be followed by a breaststroke movement. Technically, biologically, it’s possible. Yet we know that each sport has a specific unity that defines it, by which we recognize it.
What holds together this coherence, this unity, which defines a practice, an art, or a discipline?
In absolute terms, one could think it is good for us as humans to be able to do everything and know everything, in an infinite world. But no, we are organized. Of course, the unity of our disciplines, our practices, reflects the principles of order seen throughout the universe. And like the universe that nourishes us and shelters us within it, we have a natural inclination towards order. As living beings, like all living things, we have a defined order. To leave that order brings death (disease, wars, accidents).
We were at the point where the idea of unity in our disciplines mirrors the principles of order seen everywhere in the universe, both near and far. We, as living beings, much like everything that lives, possess a defined order. Departing from this order, we face the inevitable result: death—manifesting in the form of illness, wars, accidents. But this generalization alone does not suffice to explain, for instance, the unity found in our musical creations from the earliest human times.
A single line of creation, launched into the infinity of possibilities, would obviously bend and eventually break under the weight of contacts… with almost everything. It would stretch until it snaps. The mere passage of time would be enough to accomplish this. Our disciplines remain intact because they are always three intertwined lines: a line of the head (intellect, reflection, logic, knowledge), a line of the body (our physical being, its movements, health, and perceptions), and a line of the heart (our emotions, their expression, sensitivity). Each discipline is a creation that exists across three simultaneous lines. Each discipline is a bundle. A master is someone who keeps the discipline alive because they know how to play all these lines: they are physically capable, intellectually productive, and emotionally vibrant.
The three lines support each other, enabling an adaptive response to the diversity of situations in the world of infinite possibilities.
Let me take a lighthearted digression. You’ve understood that each discipline is maintained
because we unite our bodies, minds, and hearts into a flexible and living bundle, embodied by
the masters. You might say that there’s also a social environment. True, but I categorize this
environment within the world of infinite possibilities because we observe that our sporting,
artistic, and intellectual disciplines endure beyond societal changes. The “rebirth” of this or that
art, tradition, sport, or religion after the rise and fall of a totalitarian society is a common
occurrence. No, let’s instead imagine what disciplines might look like for… extraterrestrials
who might have a body, a head, a heart—and perhaps something more. A bundle of four, five,
or even more lines. Or fewer lines, but different, for each of their life disciplines. I can’t say
more, as my human imagination has its limits. But if you happen to encounter an extraterrestrial,
at least I’ve prepared you for this possibility: they may persist not because they are stronger or
smarter than us, but because they possess other life lines than ours. Or more life lines.
Let’s now delve further into the border of complexity. How do our three lines react when faced
with the immensity of all possible outcomes? And how is it that these reactions are always
coherent? How is the unity of a practice always preserved?
I previously depicted the world of possibilities as a tangle of small, straight-line segments
crisscrossing in every direction. How can we trace a path through this mess? How can we
discern order or organization? Perhaps I should now explain all the scientific methods used to
explore and map the unknown. And all the techniques that sports pioneers have used to discover
new ways of moving. And all the paths that artists follow to project their emotions into the
unknown. Yes, it would surely take only ten or twelve thousand pages, and you’d have a solid
overview of what humanity’s masters have accomplished so far, across all disciplines. Let’s
begin.
…
Of course, I will only share with you my modest personal recipe, the fruit of my life experiences
and what I’ve learned from the masters I’ve met, read, or observed. First, there’s the necessity of
work, repetition, and effort to incorporate gestures and knowledge—that is, literally to engrain
them into our bodies. It starts as a conscious and intellectual process, which, after much
practice, becomes reflexive and habitual, eventually requiring no further effort to execute. There
must be logic, to fully understand what has been transmitted and to imagine sequences,
extensions, and developments. Audacity and perseverance are required to test concretely the
products of our imagination. To harmonize them with the existing path, one must embrace a
touch of madness—the willingness to close one’s mind and step into the unknown. Let yourself
be guided by the sense of beauty. If we wish to refine the map of the unknown, we must allow it
to enter us a little. We must accept within ourselves an undefined space for ideas, for sensitivity,
for emotions, and for matter.
This recipe works for everything, from science to cooking, from religion to mechanics. This
recipe might seem a bit complex, but it is commonly known by a simple, everyday term:
creativity. False simplicity of the word itself, of course… Complexity is the inseparable
counterpart to simplicity. If you feel the bundle of a discipline vibrating within you, work, and
you will become a master. The time will come, at the right moment, for you to be both the
custodian of the discipline and its innovative cartographer. And don’t think you can decide on
the date or hour of this achievement—it is destiny that will place you there.
If you are young and aspire to mastery, that is a good thing. Humanity will rejoice in having a
positive and benevolent person like you, one who knows how to combine simplicity and
complexity, transmission and innovation. Tradition and modernity, as the brethren under the
triangle would say. If you dream only of power, your best path is to avoid confronting the
unknown. Thus, avoid seeking mastery. A master knows how to relativize power in order to
understand its rightful place; a fool seeks it entirely and wholly.
Perhaps you want more specific tools for navigating complexity? In that case, I refer you to my
book, The Art of Problems (BoD, 2022). Briefly, I assert here that complexity is approached by
varying one’s ways of thinking. Think in particles versus thinking in lines, think in waves, think
in space, think in time, think in measures, think in flow, think in solids, think in surface and
depth, in solar and vitriol… Think in hierarchy, in base and summit, in trickling and
confluence… A thousand and one ways of thinking: switch from one to another, in small or
large jumps—up to you. Confront the unknown, the forgotten, the doubtful. Doubt is crucial; it
is our permanent link to reality. Those who never doubt are either abstract ideologues or
materialists who only believe what they see.
Recently, I listened to a talk by a writer about her book on hedges. She lives… in Paris and is
neither a farmer nor a gardener. Could she write a book that wasn’t ideological? To chain ideas
together by sheer force of logic is possible, but sooner or later, these abstract chains must be
tested against the concrete world. And this is a structure subject to the world of infinite
possibilities: a single intellectual line, unbraided with a line of heart and body, will not hold for
long. It will never become a practice or a discipline. And its author will find it hard to transmit.
You see, you can only pass on what can be incorporated. Emotions are indispensable: every
human being craves to be. To be means to be complete—with a brain that imagines mysteries, a
body that moves towards warmth and light, and a heart that vibrates toward the marvelous
(wisdom, strength, and beauty). Without this triptych, there is no hunger for life.
May this essay, this meditation on simplicity and complexity, inspire you to learn. The size of
your vital space depends, first and foremost, on the breadth of your knowledge. Fools and idiots
live in a small world, fearing what they don’t know (lack of curiosity and xenophobia), idolizing
their possessions.
And don’t be fooled by false masters. Some may seem to speak with the wisdom of simplicity,
but upon a little probing, you will find nothing but trivialities, intuitions, prejudices, and snap
judgments, which they consider to be absolute truths. A true master acknowledges the limits of
their knowledge; a false master claims to have an answer for everything.
Benoît R. Sorel
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